Résumé : |
Branko Milanovic cible le cœur même du capitalisme, à travers les dérives de ses deux modèles - méritocratique et libéral aux États-Unis, d'une part ; politique en Chine, de l'autre. A défaut d'une politique radicale de réduction des inégalités, l'avenir s'annonce des plus sombres.
Après avoir analysé l'évolution des inégalités (la fameuse courbe de l'éléphant) dans Inégalités mondiales, Branko Milanovic s'interroge sur les tendances structurelles qui orientent le destin du monde.
Cela le conduit à privilégier comme grille d'analyse la dynamique du capitalisme, système qui domine désormais sans partage. Il confronte deux modèles, celui du capitalisme libéral (américain) et celui du capitalisme politique (chinois), dont il étudie les dérives, l'un vers la ploutocratie, l'autre vers une corruption accrue. L'argumentation repose sur de nombreuses données statistiques mises en perspective.
L'analyse audacieuse du rôle fonctionnel du communisme dans certains pays de l'ex-tiers monde l'illustre : les révolutions communistes ont permis la modernisation de ces pays en détruisant le mode de production féodal et en luttant contre la domination extérieure qui entravait leur développement. La conjugaison des données et de l'Histoire sert ici à réfuter une ancienne vulgate marxiste : les régimes communistes, d'autant plus efficaces que les pays étaient moins développés, apparaissent désormais comme une transition entre féodalisme et capitalisme.
Autre contribution importante du livre : la caractérisation du capitalisme politique, ou autoritaire (un Etat qui contrôle le secteur privé, une bureaucratie efficace au service de la croissance, l'absence d'Etat de droit) et de ses contradictions (une élite technocratique vs. un pouvoir discrétionnaire ; une corruption endémique vs. la légitimation du pouvoir). Enfin, Branko Milanovic s'interroge sur l'avenir du capitalisme globalisé, qui s'annonce sombre si les tendances actuelles se prolongent (ploutocratie, marchandisation de tous les domaines de l'existence et corruption, démultipliée par la globalisation).
La bifurcation vers un horizon plus radieux exige une politique radicale de réduction des inégalités (notamment de capital, financier ou humain). |